· Il découvre avidement en jugeant.
Date de création : 16.01.2010
Dernière mise à jour :
18.03.2010
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IL, ELLE, EUX …
Elle se trouvait là depuis quelques minutes et moi depuis des heures.
Je l’observais maladroitement par dépit et grand intérêt.
A ma droite un couple d’Allemand dévore goulûment une entrecôte frites.
Je ne peux que les imaginer car ils se situent à l’extrême limite de mon champ de vision et La jolie brasserie en face du jardin du Luxembourg sent le jour de semaine et retentit les dix heures.
Mes pensées vagabondes et ma noisette pour compagnie, l’excuse du café pour une place assise et une fonction celle de client de brasserie.
J’adorais imaginer moins que de me persuader dans les heures sombres de la paranoïa que les gens avaient une vie intérieure relativement riche et de fait passant non loin de moi tentaient entre deux rendez-vous de déterminer ce qu’un jeune homme à l’allure déjà si brillante attendait seul dans une vitrine regardant lascivement, presque tristement la rue s’étaler.
Je le comprenais fort bien ; comment avec de grands yeux comme les miens ne pourrais-je pas attendre quelqu’un au moins égal en beauté ? A moins que ne je ne m’accorde une pause café rapide avant de continuer une journée trépidante.
Au plan facial, gestuel, vestimentaire ou bien encore comportemental, je recelais une foule de détails tendant à aiguiller l’observateur du bitume. A priori.
Car je n’étais rien, rien de concret tout au plus un être d’emprunt. Bien loin de contrôler mes observations et d’en affiner le sens j’assimilais de nouvelles personnalités les ayant décelées chez les autres. Sûrement que tout cela n’était qu’une chimère, pourtant je pouvais façonner à l’instar d’un acteur telle ou telle facette d’un nouveau personnage bien que la flânerie rendait l’amont de ce travail instable et peu soigné.
Mon inconscient ne prenait que celles qui débridaient mon imagination ou frustration et désir se rencontrent et enfantent.
Ah ! Si le passant venait voir de plus près, son intérêt me ferait ressentir une vive flamme alors qu’un autre être me domine, excelle en moi. Je redouterais ses questions, ses pauses, sa question. Là, je m’effondrerais et tapi en moi l’instinctif animal ne peut s’enfuir, tourné et tournant en de vastes opérations défensives et de mise en garde. Lui parler à cet étranger qui a aimé ce qui sort de moi et tente de le faire ressurgir, ne croyant plus à ce nouveau personnage qui n’est que moi. Criant et riant à la supercherie, intrigué, intriguant, amoureux encore d’un autre, d’un troisième qu’il appelle mystère.
Mais je me fourvoyais. Je n’attendais personne et personne n'était venu me parler, mon seul désir de la journée je l’accomplissais en ce moment même.
Les hommes ne rêvaient pas ; enfin si mais juste pendant des espaces de temps calculés, un ciné, un jeu, un livre…Peu de surprises, encore moins d’arrêt contemplatif..
Pauvre de moi.
J’avais eu beaucoup de mal à dormir ce matin là. Je n’étais pas sorti la veille ce qui me laissait entrevoir une vision bien trop réaliste de mon appartement. Un classique studio d’une vingtaine de mètres carrés, premier étage avec ascenseur, proche Bastille à Voltaire et tous commerces, ensoleillé trois mois dans l’année avec vue imprenable sur le voisinage. Mon goût pour l’extérieur avait empiété sur la qualité de mon intérieur, autant dire qu’il se trouvait dans un état proche du vide.
Une approche plus orientale le définirait plus comme une sorte d’avant-gardisme occidental de par sa sobriété et son efficacité mais la saleté déguisant à peine le manque de goût contrastait, voir annulait tout sens philosophique ou esthétique.
En l’espace de deux ans seules de fréquentes apparitions féminines plus ou moins longues le rendait cosy et presque chaleureux. Un début d’âme fréquentait les lieux ; le choix d’une lava lampe…rouge, quelques copies de sérigraphies et notamment le baiser de l’Hôtel de Ville, d’autres œuvres de peintres Allemands sur format papier, enchevêtraient mon monde dans un format unique ou l’œil féminin ne s’y trompait guère. Bref. Je vivais dans une garçonnière charpenté par l’essence féminine.
Tout était lié, que ce soient mes levers matinaux ou bien mes absences allongées hors de chez moi des nuits entières avec la traque sempiternelle de la prochaine décoratrice. Ou que ce soit leur coût déraisonnable qui lentement me libère du bien matériel, qui m’emprisonne dans une nouvelle image de moi inventée de toutes pièces par ceux qui m’aiment encore, ceux qui justifient mon existence aux yeux de mes détracteurs. Ils en font partie bien souvent, faut-il qu’ils m’aiment.
Avoir, pour moi, bien loin de posséder est une perpétuelle location, j’étais l’hôte de Paris et elle me le rendait bien.
Un sentiment de liberté coulait dans mes veines en continu.
L’absence d’un futur serait le prix le plus fort mais combien pouvaient se targuer du haut de petites vingtaines d’années de vivre et seulement vivre ? En tous cas pas ceux dont la sécurité constituaient la pensée.
Ne les jugeant pas, bien au contraire, ma préférence allant naturellement vers les individus les plus admirables, ceux dont les pas foulaient mes aspirations avec un bonus pour les plus aisés.
Car,une relation qui naît est un entrelacs obscur de coïncidences venue de choix plus ou moins décidés. L’inconscient se destine aux détours des petits choix de tous les jours. Aborder quelqu’un c’est se révéler, non par le fait du hasard bien ou malvenu qui ne considère pas le merveilleux mais juste par la folie du moment celle qui pourrait enflammer une existence.
Le moment donné est à noter.
Plus important que tout il incendie la vie et je conchie le tout à chacun qui le transforme en vulgaire acte de dévotion sociale ou bien encore s’épanche avidement sur l’autre rendant médiocre l’acte de découverte, le passage magique qui précède la rencontre.
Cette être ignoble est insaisissable car nous le sommes tous, jamais en même temps.
Nous l’avons tous rencontré cette sordide âme en peine de vraie individualité, celle qui marque le reflet de tout être à une condition déjà annoncée, étroite, bien plus obscure que ne peut noircir un mauvais et passager côté humain.
Illusion et vanité sont les adversaires du vrai égocentrisme, celui qui se trompe, celui qui avance donc.